En 2006, à tout juste 19 ans, je me lance dans ma première grande aventure en solitaire : une traversée du Sahara par la route de l’Ouest, du Maroc jusqu’aux rives du fleuve Sénégal. Je pars pour deux mois, sac sur le dos, à la découverte de cette Afrique porteuse de mes racines.

De la ville de Casablanca où je viens chaque année rendre visite à ma famille marocaine, j’embarque dans un bus qui me mène tout droit à Laâyoune, la plus grande ville du Sahara marocain. 24 heures de route et 1000 kilomètres de désert plus tard, j’ai l’impression d’arriver dans un autre monde. L’ambiance est très différente du Maroc que je connais. Ici, les femmes portent des melhafas, ces voiles légers aux mille couleurs qui protègent du vent et de la poussière du désert, et le dialecte marocain fait peu à peu place à la langue hassaniya, dialecte arabe également parlé en Mauritanie. De Laâyoune à Dakhla, je découvre ce territoire d’étendues infinies battues par les vents de l’Atlantique. C’est ce paysage fascinant de désert chaud et brûlant contrastant avec les immenses vagues turquoises de l’océan qui m’a poussée à faire ce voyage.



A 2000 kilomètres de Casablanca se dresse déjà la frontière mauritanienne. Un tampon et me voilà hors du Maroc… Mais toujours pas en Mauritanie ! Les deux territoires sont en effet séparés par un « no man’s land » de 2 kilomètres où vous n’êtes ni au Maroc, ni en Mauritanie, autant dire nulle part ! Deux kilomètres de sable truffé de mines, où aucune loi ne s’applique.. et où les trafiquants rôdent. Pas la peine de préciser que je ne comptais pas m’y attarder! C’était sans compter sur une galère incontournable de toute traversée du désert : l’ensablement du camion qui m’avait gentiment prise en autostop! Résultat : plusieurs heures d’efforts pour désensabler le véhicule en plein cagnard et surtout un stress énorme à la vue du moindre mec un peu louche s’approchant du camion… Il va falloir attendre encore un peu avant de fouler le sol mauritanien !

Enfin, la Mauritanie ! Après un mois de bus et d’auto-stop depuis Casa et plus de 2000 kilomètres de route, me voilà aux portes de Nouadhibou, 2ème ville et capitale économique du pays. Une cité étrange, battue par les vents du désert et de l’océan, dont les plages sont bordées d’épaves de bateaux en tous genres et où plane une curieuse sensation de bout du monde. Les journées y sont rythmées par l’accueil chaleureux de ses habitants, toujours prêts à m’offrir un verre de thé, tandis que les nuits, ce sont les migrants en partance pour les Canaries ou le Maroc qui alimentent les palabres des longues soirées d’été…



Trois semaines s’écoulent à Nouadhibou avant que je ne décide de reprendre la route. Un pouce levé et me revoilà auto-stoppeuse, direction Nouakchott ! Lorsque le 4×4 de mes gentils pilotes passe les portes de Nouadhibou et trace à toute allure à travers les 500 kilomètres de désert absolu qui nous séparent de la capitale, je réalise que j’étais bel et bien au bout du monde ! Sept heures de route sur une fine bande de goudron brut posé en plein milieu des sables… Une chaleur terrifiante. Un contraste goudron noir/sable jaune ininterrompu jusqu’à Nouakchott.

La capitale de la Mauritanie, la voilà sous mes yeux ! A 2500 kilomètres de Casablanca, après quasiment deux mois de voyage, me voilà enfin aux portes de l’Afrique Noire ! Quelques jours à peine à Nouakchott et déjà, l’appel de l’inconnu se fait trop pressant. Je décide de mettre immédiatement cap sur le Sénégal !
De Nouakchott à Saint-Louis, je vais vivre la journée de route la plus éreintante de tout mon périple africain. A partir de la capitale, j’embarque dans un « taxi-brousse » à destination de la frontière sénégalaise. Le principe de cette sorte de taxi collectif est qu’il doit être bondé le plus possible afin que le chauffeur rentabilise au maximum son parcours.. et que les passagers arrivent complètement claqués à destination. C’est donc coincée pendant 5 heures entre un mec immense et une petite mamie belge que je contemple malgré tout les paysages du sud de la Mauritanie. Peu à peu, le jaune ocre du désert laisse place à de plus en plus de verdure. Après des semaines dans le Sahara, je ne suis plus habituée à voir autant de végétation. Enfin, après plusieurs heures à souffrir sur une route truffée de nids de poule, le taxi s’arrête et nous fait signe de descendre : nous voilà arrivés au bord du fleuve Sénégal !



La joie est là, mais les peines, elles, sont encore à venir. Comme disent les Africains, « en Europe, vous avez l’heure, en Afrique nous avons le temps ! ». Je patiente donc paisiblement pendant encore 4 heures avant de pouvoir embarquer sur une longue pirogue qui me mènera de l’autre côté du fleuve, en terre sénégalaise.
A l’approche de la rive opposée, mes yeux s’écarquillent. Quelle sensation et quel spectacle! Je ne suis jamais arrivée dans un pays en pirogue! A partir de là, c’est un autre monde qui s’offre à moi. Ca y est, la voilà, l’Afrique que je ne connais pas, toute en couleurs, en verdure et en surprises ! Des promenades sur les longues plages de Saint-Louis aux ateliers de cuisine avec les mamas africaines en passant par les séances d’essayages dans les magasins de tissus wax aux mille couleurs, mon itinérance africaine prend doucement fin au milieu des sourires chaleureux des Sénégalaises et Sénégalais.
Pour voir toutes les photos de cette itinérance africaine, rendez-vous sur ma galerie Flickr.